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Violence faite aux femmes et aux filles : Des victimes et parents de victimes témoignent

jeudi 2 juillet 2015

En dépit des nombreux textes et conventions ratifiés en matière de droits humains au plan international et national, des violations de droits sont de plus en plus rencontrées dans nos sociétés. Ainsi, dans tous les pays, des violations de toutes natures sont subies par les populations en général et les femmes en particulier. Quelques unes d’entre-elles se confient.

Dolotière à Ziniaré
« Ma belle sœur me rend la vie impossible »

Je vends du dolo pour assurer ma pitance quotidienne. Un jour, lorsque j’étais en pleine activité, ma belle-sœur m’a rejoint au marché soit disant qu’elle avait besoin de l’âne. J’ai voulu savoir à quelle fin et c’est là qu’elle m’a répondu que l’animal appartient à son mari et que par conséquent, elle n’avait d’explication à rendre à quiconque. De retour à la maison, mon calvaire ne faisait que commencer. Car elle m’a refusé l’accès à la cour. Calmement je lui ai fait comprendre que la cour est certes pour son mari mais c’est avant tout celle de notre père. Refusant d’accepter la réalité, elle m’a traitée de tous les noms et pour ne pas que la situation empire, je suis allée m’asseoir sur la tombe de ma mère. Là encore, elle m’a rejoint en me proférant des injures. Même qu’elle s’en est prise à ma défunte mère. Ne pouvant rester indifférente à ses injures, sans que je ne m’en rende compte, mes doigts se sont retrouvés dans sa bouche et pour me défendre je lui ai donné un coup dans la bouche. J’ai été gravement blessée à l’annulaire et c’est ce qui m’a amenée à l’hôpital. Une fois au dispensaire, le médecin m’a prescrit des produits que je n’ai pas pu payer intégralement. Plus les jours passaient, plus la blessure s’aggravait, c’est suite à cet état de fait qu’une personne m’a conseillée de me rendre à la direction régionale de la Promotion de la femme et du genre de Ziniaré pour solliciter de l’aide. J’y ai été et aujourd’hui, je commence à recouvrer la santé. Je remercie de passage le directeur régional pour son aide. En dépit des mésententes, je vis toujours dans la cour et le plus incroyable dans toute l’histoire, c’est que mon frère m’a menacée de décoiffer le toit de ma maison comme quoi c’est lui qui l’a mis pour notre défunte mère. J’endure toute cette souffrance parce que je ne peux plus retourner chez mon mari. J’ai été accusée d’adultère par les gens voilà pourquoi mon mari m’a renvoyée de chez lui mais mes cinq enfants sont restés avec lui. Seuls ces derniers me donnent la joie et la force de persévérer dans la vie. Mon ainé vient d’avoir son BEPC.

Victime d’exclusion sociale à Koudougou

« Atteinte du cancer de sein et sans aucune aide de la part de ma belle famille »
J’ai perdu mon mari il y a de cela quatre ans et comme on le dit toujours, un malheur ne vient jamais seul. La même année, j’ai contracté le cancer du sein. Et je puis vous dire que depuis lors, je n’ai jamais eu le soutien de mes beaux parents. Pire encore, à l’hôpital on exige la présence d’un membre de la famille avant mon intervention. Seule ma famille m’assiste dans cette dure épreuve. Ma situation financière n’est pas du tout facile quand on sait que j’ai cinq enfants à ma charge. Jusqu’aujourd’hui, mes deux coépouses et moi, sommes laissées à notre triste et misérable sort. Pour la petite histoire, dernièrement, j’ai voulu construire une maisonnette dans la cour parce que la mienne où je dors avec mes enfants est en très mauvais état mais les beaux frères se sont farouchement opposés. Jusqu’à l’heure c’est la « guerre » entre nous.

Cas de grossesse indésirée à Koudougou
« Je suis enceinte et le père refuse de reconnaitre sa paternité »

J’ai été abandonnée par ma mère dès ma naissance et jusqu’aujourd’hui j’ignore qui elle est. Elevée par mes grands-parents, j’ai été scolarisée jusqu’à la classe de 5e où une grossesse m’a contrainte à abandonner à jamais mes études. Durant ma grossesse, j’étais logée chez le père de mon futur enfant mais la vie au sein de sa famille n’était pas du tout commode alors je suis partie de la cour. Ce n’est qu’après trois ans qu’il est venu voir son fils et me l’a retiré pour toujours. Après cet épisode de ma vie, j’ai erré dans la rue jusqu’au jour où un homme me proposa de m’héberger chez lui, n’ayant pas le choix, j’ai accepté sans hésiter. De cette cohabitation est survenue une grossesse et pour fuir ses responsabilités, ce dernier m’a remis la somme de 25 milles FCFA pour que je me fasse avorter. Catégorique, j’ai refusé cette solution car la première fois je ne l’ai pas fait, ça ne sera pas non plus à ma deuxième grossesse que je le ferai. Depuis notre dispute, il est devenu injoignable c’est pourquoi je l’ai convoqué à l’action sociale pour qu’il assume ses responsabilités. Comme sanction, il me donnait 12.500 FCFA par mois que je gardais précieusement pour mes futurs besoins. Un jour, une femme m’a embauchée, en cachette, chez elle comme servante et depuis trois mois maintenant, son mari ignore que je travaille pour son épouse. Les soirs, je continuais mes habitudes quotidiennes qui sont de dormir dans les maquis et ce, à des heures indues. Par contre, une chose me laisse perplexe, chaque nuit il y a un enfant qui me suit, cela m’effraie beaucoup mais il me dit tout le temps qu’il ne me fera pas de mal. Mon avenir est entre les mains de Dieu. Si les moyens venaient à me faire défaut après mon accouchement, je confierai mon bébé à l’action sociale ou à un orphelinat.

Exclusion sociale à Koudougou
« Mon défunt mari a travaillé au Haut-commissariat de la région du Centre-ouest mais ses collègues n’ont pas eu pitié de la veuve ni de ses enfants »

J’ai perdu mon mari le 15 octobre 2003. Un mois après son décès, un homme du même village que lui et que je n’avais jamais vu auparavant est venu me dire qu’il avait acheté ma maisonnette. A hauteur de 1 200 000 fcfa, ce dernier a financé le président du tribunal en son temps pour qu’il nous expulse de chez nous. Mon malheur n’en finissait pas car le Haut-commissaire à l’époque m’a aussi chassé de la maison du camp fonctionnaire où je vivais avec mes trois enfants. Je l’ai supplié au nom de tous les Saints mais il a fait la sourde oreille. Espérant avoir du soutien, j’ai fait recours à la directrice régionale de la promotion de la femme mais qu’elle ne fut ma surprise, cette dernière m’a jeté à la figure que j’ai eu la chance que Iliasse ne m’ait pas frappée. Allez- y comprendre comment une femme qui est sensée comprendre la douleur d’une autre femme, peut réagir de la sorte. Je me suis mise à pleurer ! Pour subvenir aux besoins de ma famille, j’ai dû essuyer les locaux de l’école publique pour le développement et mon frère m’aidait avec la scolarisation. Aujourd’hui, grâce à Mathieu Valiha, je travaille dans un projet et je m’en sors très bien. De mes enfants, seule la benjamine ne travaille pas pour le moment. Mon fils et moi avons eu le travail la même année, il est aujourd’hui à l’école de la police, ma fille quant à elle, est mariée et travaille dans le domaine de la santé. Vous parlez de violence faite aux femmes, même les autorités en font partie, par conséquent il faut les sensibiliser eux aussi. Je ne pourrai jamais oublier que j’ai été chassée comme une sorcière des maisons du camp fonctionnaire parce que par malheur, Dieu a appelé mon mari auprès de lui. Pour l’amour de Dieu, aidez les veuves et les orphelins car ils en ont grandement besoin. Grâce à mon frère et à mon avocat, le Permis urbain d’habiter (PUH) a été établi au nom des héritiers que sont les enfants et moi.

Bernadette Ilboudo/Kanazoé, directrice régionale des Droits humains du Centre-Ouest
« Les femmes subissent sans pour autant réagir »

Nous avons reçu une dame au niveau de notre centre d’écoute et d’orientation sur les cas de violation des droits humains. Il s’agissait d’un cas d’accident qu’il y a eu. La maman était avec son mari, malheureusement ce dernier est décédé. Le quiproquo, le frère du défunt voulait marier la femme et même que la famille était pour cette union. Elle a été répudiée parce qu’elle a osé refuser. Ils lui ont par ailleurs arraché ses deux filles. Le monsieur arrivait à peine à subvenir aux besoins de ses propres enfants à plus forte raison que de s’occuper des enfants d’autrui. Ainsi, il obligeait les enfants à vendre les karités au bord de la route pendant la saison hivernale. Un jour, une des fillettes est sortie pour faire son commerce et un car l’a écrasée. L’oncle, pensant se faire de l’argent après le décès, a entrepris des démarches pour l’assurance mais malheureusement pour lui, il n’avait pas les pièces des enfants parce que la mère, avant de partir, a pris le soin de tout emporter avec elle. Il est allé voir la dame, mais celle-ci n’a pas réagi. Alors il est venu me voir afin que j’intime l’ordre à la femme de lui remettre les documents parce qu’il avait en charge la petite et que s’il y a des frais c’était à lui de les réclamer. C’est suite à ses propos que je lui ai rappelé qu’il n’était pas l’ayant droit direct de l’enfant puisque la maman est toujours vivante. Je lui ai alors recommandé de s’entendre avec la mère et depuis ce jour il n’est plus jamais revenu.

La vieille de Koudougou
« Veuve, son beau frère lui fait des misères »

Ma sœur a perdu son mari à Abidjan alors elle est rentrée au village avec la dépouille pour les rituels. Son beau frère la veut pour épouse malgré qu’elle ait neuf enfants. Etant toujours dans le veuvage et ne voulant pas s’engager avec ce dernier, elle nous a alors informé de la situation pénible qu’elle vivait. Comme conseil, nous ses sœurs, nous l’avons conseillée de choisir un enfant comme son nouveau mari afin de pouvoir vivre tranquille dans la cour. Mais cela n’était pas dans l’entendement du beau frère qui usa de toutes les malices pour parvenir à ses fins. De nos jours, elle vit dans la maison de son défunt mari et avec pour quotidien souffrance et maltraitance de la part de son nouveau mari et de ses coépouses…

Victime de violence physique à Dédougou
« Ce n’est pas parce qu’elle est de votre sang que vous avez le droit de choisir sa destinée »

C’est l’histoire d’une nièce que j’ai fait venir du village pour m’aider dans mes travaux domestiques. Pendant la fête de l’Assomption elle est rentrée chez ses parents. De son explication, elle revenait de la messe lorsque six hommes l’ont interceptée soit disant qu’ils l’a voulaient pour épouse. Face à son refus catégorique, ils l’ont malmenée jusqu’à ce qu’elle ne puisse plus tenir sur ses deux pieds. Suite à cela, l’un d’entre eux est allé chercher une mobylette pour l’amener dans leur village. Une fois à destination (à Sakina) voyant qu’elle ne recouvrait toujours pas sa lucidité, pris de peur, ils l’ont amenée au dispensaire pour des soins. Informés de l’incidence qui venait de se produire, les parents sont allés au secours de leur fille et c’est ainsi qu’elle a pu rejoindre son domicile parental. Néanmoins, cette affaire n’a pas fait le moindre bruit car la fille est la nièce des ravisseurs, ce qui leur donne un plein droit sur elle, selon la tradition. Quelques mois plus tard, le père m’a recontacté pour voir si je pouvais reprendre sa fille. Chose que je n’ai pas hésité à faire et depuis lors elle n’est plus repartie au village.

Fadima Boureima/Dicko, SG de l’association la patience de la femme du Senou
« Le mariage forcé vu d’un autre sens n’est pas un mal en soi »

Dans la région du Sahel, nous avons connu des cas de fistule avec nos filles qui se sont mariées avant leur 18e année. Mais nous rendons grâce à Dieu car certaines d’entre-elles ont été réparées au Centre Hospitalier Régional de Dori. Pour ce qui me concerne, à la fin de ma 16e année, j’ai été victime d’un mariage précoce. A cette époque, une fille ne pouvait pas outrepasser la volonté de ses parents au risque d’être bannie de la famille. Cette union a eu des répercutions certes pour mon cursus scolaire parce que je faisais la classe de 3e, mais Dieu faisant ainsi bien les choses, cet homme m’a accompagnée dans mes études. Cela trouve son explication dans le fait qu’il était un fonctionnaire, imaginez un instant ce qu’aurait été ma vie s’il n’était pas instruit.

Aïssata Laure G. Sidibé (Stagiaire)
Lefaso.net

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