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Burkina : Rasmata Konfo lutte pour l’inclusion sociale des personnes vulnérables à travers son association La Perche de l’inclusion

lundi 6 mai 2024

Depuis son établissement en 2016, l’association La Perche de l’inclusion s’est engagée à apporter un soutien indispensable aux personnes les plus vulnérables. En effet, l’association s’est donné pour mission de venir en aide à toute personne qui est dans le besoin et qui ne sait vers qui se tourner pour avoir de l’accompagnement ou de l’écoute. L’association a comme cibles les enfants, les veuves et les personnes en situation de handicap. Dans cette entrevue, Rasmata Konfo, la coordonnatrice, nous dévoile son parcours, les obstacles rencontrés et lance un appel à la solidarité pour bâtir un Burkina Faso plus inclusif et uni.

Lefaso.net : Qu’est-ce qui vous a incité à mettre en place cette association ?

Rasmata Konfo : Nous avons remarqué qu’il y a plusieurs personnes en situation de handicap qui sont dans le besoin et qui n’ont pas vraiment compris pourquoi ils doivent se battre malgré leur handicap. Ils n’ont pas compris pourquoi ils doivent accepter leur handicap et pourquoi ils ne doivent jamais baisser les bras. C’est la raison pour laquelle nous avons décidé de mettre en place cette association. La Perche de l’inclusion travaille également pour l’autonomisation des femmes.

Combien de personnes vulnérables avez-vous eu à accompagner ?

Nous avons pu accompagner bon nombre de femmes, d’orphelins et de veuves. J’ai tout fait pour avoir des crédits pour des femmes, pour leur permettre de quitter les feux tricolores. J’ai aussi aidé des veuves afin de leur faire savoir qu’elles doivent être elles-mêmes autonomes pour prendre en charge les frais de scolarité de leurs enfants.

Nous accompagnons les orphelins, les enfants vivant avec un handicap, les enfants vulnérables. Chaque année, nous essayons de collecter des kits scolaires pour permettre à ces enfants de repartir à l’école comme les autres enfants et nous accueillons aussi certains enfants chez moi à domicile ici quand leur cas est très critique parce que les enfants que nous allons marginaliser deviendront plus tard un danger pour le Burkina Faso. Cette guerre qui est là et qui ne finit pas, ce ne sont pas des gens d’ailleurs, ce sont nous-mêmes nos frères et sœurs qui nous combattent parce qu’ils ont été abandonnés, rejetés et méprisés. Un enfant marginalisé est prêt à prendre un fusil au détriment de l’argent pour combattre son pays.

C’est un combat quotidien que nous menons pour sensibiliser les familles. Il ne faut pas dire que ce n’est pas mon enfant. Si tout un chacun pouvait accepter prendre un enfant de la rue, un orphelin chez lui, est ce qu’on aura des enfants de la rue ? Mais au Burkina Faso, on se dit que ce n’est pas mon enfant, je ne peux pas le prendre car il n’a pas une bonne éducation et il viendra influencer mon enfant. Si nous pouvons payer de la nourriture pour aller leur donner dans la rue, pourquoi pas ne pas les accepter chez nous, leur donner de l’amour, les éduquer ?

Quelles sont les difficultés auxquelles vous faites face dans votre lutte ?

Les obstacles sont nombreux parce que quand tu es présidente d’association, il faut t’attendre à tout. Et si tu ne peux pas accepter cela, tu ne peux même pas diriger. Les gens vont croire que toi tu gagnes de l’argent mais que tu ne leur donne pas. Moi dès que j’entends quelque chose, je ne dis rien, je ne réponds pas. Je mets à l’épreuve cette personne qui sera à côté de moi tout le temps, pour qu’elle comprenne que même si on me donne 5 000 FCFA pour réaliser une activité, toute la somme sera utilisée.

Aussi quand tu mènes des activités, on va dire : elle-même elle est dans le besoin mais elle fait le malin en lançant des SOS. Donc il faut être fort dans la tête pour comprendre et accepter qu’on te critique.

De plus, notre association n’a pas d’accompagnement. Cette année, je crois dans le mois de février, nous avons croisé Oxfam qui a bien voulu nous accompagner. Il nous a aidé à élaborer un projet. C’est un projet qui nous tenait à cœur depuis des années, mais nous n’avions pas les moyens de le réaliser. Les parents ne veulent pas causer avec leurs enfants de la sexualité donc nous avons pris des filles vulnérables et handicapées pour les former et sensibiliser sur la nécessité d’accepter leurs corps, le comprendre, vivre avec les menstrues et ne pas être sales. Ce projet a donc concerné 40 filles de 14 à 16 ans qui voient déjà leur menstrues.

Quel appel avez-vous à lancer à l’endroit de ces groupes vulnérables que vous aidez ?

Ceux et celles qui s’adonnent toujours à la mendicité, je n’ai rien compris. Pendant des années, vous vivez de ça mais vous n’avancez pas. Donc vous ne pensez pas que dans votre vieillesse ça sera compliqué ? Qui va vous pousser pour que vous sortez mendier ? Je suis d’accord qu’au début vous n’ayez pas quelque chose mais en sortant, les gens vont vous donner quelque chose.

Avec 2 000 FCFA, vous pouvez vous assoir devant la porte et vendre des arachides, des balais, du charbon et si les gens sont conscients, ils ne peuvent pas vous sauter et aller payer chez quelqu’un d’autre car ils voient que tu veux sortir de la précarité. Mais je n’ai pas compris c’est vous qui êtes tout le temps au feu. On dit il y a don de vivres quelque part, vous courez vous partez. Et si ces gens-là meurent ? Qui va vous donner ?

Ensuite, les veuves surtout celles de nos FDS, j’ai remarqué que lorsqu’on partage quelque chose aux veuves, elles courent elles partent prendre et reviennent s’assoir pour attendre encore qu’on leur dise de venir donner les papiers de leur mari pour prendre de l’argent. Mais si vous-mêmes vous entreprenez quelque chose, ce n’est pas mieux ?

Il ne faut pas être là à les accompagner tout le temps. Il faut leur apprendre aussi à entreprendre. Leurs enfants doivent manger, partir à l’école, se soigner. Si vous allez attendre que ce soit une personne qui vienne vous donner 500 000 FCFA pour que vous vous partagiez, vous êtes combien au total au Burkina ? Même si c’est 1 000 FCFA qu’on donne, vous partez prendre vous revenez, cela ternit même votre image.

Apprenez à dire à ces personnes qui vous donnent de l’argent de vous former et de vous doter de matériel pour que vous-mêmes vous puissiez apprendre quelque chose. Si tout le temps tu tends la main, je ne sais pas si tu as une dignité. Il faut te forcer, il faut toi même être formée pour pouvoir former tes enfants, leur apprendre à être autonomes. Si toi-même tu vis de la mendicité, tu vas apprendre à tes enfants à vivre de la mendicité ? Donc vous devez changer de mentalité.

Aussi, notre association a eu un accompagnement de Oxfam et nous avons pu former ceux de Ouagadougou. Mais nous ne voulons pas rester seulement dans la capitale car nous avons des représentations de notre association dans d’autres communes. Dons nous lançons un appel à tous les partenaires de penser à nous car nous souhaitons aller dans les 13 régions pour passer notre message et former des filles responsables.

Un dernier mot ?

Mon dernier mot revient à Lefaso.net pour avoir eu l’idée de venir vers nous pour savoir ce que nous faisons et mettre cela à la lumière. Si tout le monde faisait cela, nous pensons que cela allait contribuer à nous faire connaître du côté des partenaires et ONG. Donc longue vie à Lefaso.net, bon vent à vous.
Merci.

Hanifa Koussoubé
Lefaso.net

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