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Colette Nana : « Les femmes n’ont pas accès à la terre »

lundi 5 octobre 2015

L’accès à la terre est l’une des difficultés auxquelles les femmes rurales sont confrontées. Collette Nana est la présidente de la Fédération nationale des femmes rurales du Burkina (membre de la confédération paysanne du Faso). En marge du lancement de la campagne « les femmes rurales pour un Burkina sans faim » en septembre dernier, elle nous a parlé des obstacles qui freinent le développement de l’agriculture des femmes.

« Les difficultés que nous rencontrons sont essentiellement le problème d’accès à la terre. On n’a pas droit à la terre en tant que femmes. Donc on est obligé de négocier avec les hommes. Là aussi quand vous mettez l’engrain, vous travaillez bien et que les récoltes sont bonnes, la saison qui suit, le propriétaire retire son terrain. Il peut prétexter que c’est son fils qui est revenu de la Côte d’Ivoire ou que c’est son beau-père qui a besoin d’un champ. Par conséquent, il retire sa propriété.
On est obligé d’aller négocier ailleurs. Ce qu’on nous donne, ce sont des terrains arides. Nous prenons le temps qu’il faut pour les rendre fertiles. Et c’est le même problème, car on va te le retirer encore. Donc les femmes rurales souffrent de ce manque de propriété de terrain.

« Les femmes rurales n’ont pas droit aux crédits »

En plus de cela, nous rencontrons des problèmes d’accès aux crédits. Les femmes rurales n’ont pas droit aux crédits. On nous demande des garanties. Or nous, on n’a pas de garanties. Si nous partons demander du crédit, on nous demande d’amener le titre foncier de notre mari. Les maris n’acceptent pas donner leurs titres fonciers à leurs femmes. Ce qui fait que les femmes ont des problèmes pour avoir accès aux crédits. Quand tu demandes 200 000 F CFA, on te dit de garantir 400 000 F CFA. Si tu avais les 400 000 F CFA, tu n’allais pas aller en banque. C’est ce qui fait qu’on a des problèmes pour accéder aux crédits.

« Nos noms sont sur les listes, mais nous ne recevons pas »

Et surtout les intrants. On nous a dit qu’on allait subventionner pour les femmes. Mais c’est zéro. Nos noms sont sur les listes, mais nous ne recevons pas. Si ça vient, on partage ça entre les hommes et on nous met de côté. On est obligé d’acheter. Si tu va sur le marché aussi, c’est l’engrain du Ghana. Si tu mets dans ton champ, ça ne donne pas bien. Ce qui fait qu’on a des problèmes.

« On est sûr que si nous sommes impliquées dans le partage, nous aussi nous allons avoir notre part »

Nous demandons à l’Etat de nous aider en mettant en œuvre l’article 34 de la loi sur le foncier. Comme cela, on peut nous prêter le terrain avec un temps précis. Cela peut être deux ans, trois ans. On pourra même s’entendre avec les propriétaires terriens pour leur donner le produit de notre récolte. Cela va nous donner plus de stabilité pour mieux travailler.
Pour la subvention que l’Etat accorde, on aimerait avoir 50% pour les femmes et 50% pour les hommes. Nous demandons aussi qu’on nous implique dans les structures agricoles notamment dans les chambres régionales d’agriculture. On est sûr que si nous sommes impliquées dans le partage, nous aussi nous allons avoir notre part. C’est parce que nous ne sommes pas impliquées que nous ne recevons rien.
Même le matériel qu’on donne. Souvent c’est incomplet. On a vu du matériel posé au soleil notamment des moulins parce qu’il manque du matériel pour les faire fonctionner.
Nous demandons à l’Etat, aux hommes politiques de travailler à trouver des solutions à ces préoccupations. On ne peut atteindre le développement sans les femmes ».

Propos recueillis par Judicaël Gaël Lompo
Lefaso.net

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